Par pierre Kabakila
Dans une tribune publiée ce dimanche 23 février, Joseph Kabila, ancien président de la République Démocratique du Congo (RDC), dénonce la dérive autoritaire de Félix Tshisekedi, qu’il accuse d’avoir muselé toute forme d’opposition depuis son arrivée au pouvoir en 2019.
Saluée comme une alternance pacifique historique, cette transition a vite tourné au désenchantement, selon Kabila, qui pointe du doigt la rupture du Pacte républicain issu du dialogue de Sun City – un accord auquel il avait contribué en 2002 pour mettre fin à des années de guerre civile. Aujourd’hui, il alerte sur une crise multidimensionnelle qui menace d’imploser le pays, notamment dans l’Est.
Kabila soutient que la situation sécuritaire dans les régions orientales de la RDC, marquées par la présence de groupes armés comme le M23, ne peut être réduite à un simple conflit avec le Rwanda ou à des actions anarchiques, comme le prétend Kinshasa. Pour lui, cette crise, qui a éclaté en 2021, est bien plus profonde : sécuritaire et humanitaire, certes, mais surtout politique, sociale et morale.
Il reproche à Tshisekedi d’ignorer ces racines en violant délibérément la constitution de 2006, socle de stabilité nationale, et en orchestrant des élections truquées en décembre 2023, amplifiant ainsi son illégitimité.
L’ancien président accuse Tshisekedi d’avoir instauré un régime tyrannique où l’opposition est écrasée par l’intimidation, les arrestations arbitraires et les exécutions extrajudiciaires. Journalistes, leaders d’opinion et même chefs religieux sont contraints à l’exil ou réduits au silence, tandis que le chef de l’État, maître absolu, envisage publiquement de modifier la constitution.
Ce grand revers démocratique, selon Kabila, est le moteur principal de l’instabilité actuelle, bien au-delà des affrontements avec le M23.
Kabila critique également le rôle de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), et en particulier de l’Afrique du Sud, qui envoie des troupes pour soutenir ce qu’il qualifie de dictature. Il juge cette approche inefficace et coûteuse, arguant qu’elle ne résout pas les causes profondes de la crise – notamment la mauvaise gouvernance de Tshisekedi – et qu’elle contredit les valeurs humanistes de Pretoria. Pour lui, ces interventions militaires ne mettront pas fin aux massacres perpétrés par l’armée et la police congolaises contre la population.
Revenant sur son propre héritage, Kabila rappelle que le Pacte républicain de Sun City, facilité par les présidents Quett Masire et Thabo Mbeki, avait permis de réunifier la RDC, d’organiser trois élections et d’assurer une alternance pacifique. Sa remise en cause par Tshisekedi, à travers des violations constitutionnelles et un endettement galopant, constitue une trahison de cet acquis, plongeant le pays dans une spirale de troubles politiques et d’insécurité, particulièrement dans l’Est.
Face à cette situation, Kabila appelle à une solution globale, loin des seules contributions militaires. Il insiste sur la nécessité de répondre aux griefs du peuple congolais, qui souffre d’une gouvernance oppressive et d’une crise économique aggravée. Sans une réforme politique et un dialogue inclusif, les efforts pour pacifier l’Est, même en cas de défaite du M23 ou d’accord avec le Rwanda, resteront vains, prévient-il.
L’ancien président met en garde contre les conséquences régionales d’un échec. Une RDC déstabilisée par une guerre civile potentielle fragiliserait toute l’Afrique centrale et australe, un risque que la SADC, selon lui, sous-estime. Il exhorte l’organisation à privilégier la diplomatie et le soutien à la démocratie plutôt que de gaspiller des ressources pour prolonger un régime contesté.
Joseph Kabila interpelle le monde sur l’urgence d’agir face à la tyrannie de Tshisekedi et à la crise dans l’Est de la RDC. « Le peuple congolais mérite mieux qu’un pouvoir qui le bâillonne et le réprime », déclare-t-il, appelant à une mobilisation internationale pour une paix durable.